Situé à Saint-Julien-Beychevelle, dans le Médoc, voici l’un des plus vastes domaines avec ses 250 hectares de parc, de vignes et d’arbres. Un lieu marqué par des femmes d’exception qui ont façonné ce Versailles du Bordelais, que l’on finit pourtant par oublier tant on est frappé par l’horizon arboré donnant sur la Gironde, tant on est émerveillé par la confrontation entre un jardin à la française sous le vaste perron et le parc naturel en contrebas. Celui-là même qu’on vous propose d’arpenter, gratuitement, une fleur à la bouche.

Au programme de cet été au Château Beychevelle dans le Médoc, des flâneries proposées par le grand cru classé, parmi de nouvelles installations créées in situ — dans le parc ou dans le chai — et exposées toute la saison estivale en sus des œuvres permanentes. On chemine ici les mirettes écarquillées, les sens aux aguets, entre une faune et une flore largement préservées. La déambulation est encore émaillée des œuvres (en dur) de l’édition 2023 des artistes Rémi Denjean, Mier Soleilhavoup ou Franck Espagnet.

Du land art joyeux

En 2024, le collectif Prise de Terre, et sa joyeuse troupe de plasticiens et artistes, a réalisé une trentaine de manchots et une grappe de raisin géante (sept mètres de long !) à partir de terre, d’argile et de sarments issus du parc. Toutes ces œuvres seront amenées à naturellement évoluer pour disparaître un jour et se fondre dans le paysage. Du land art joyeux, facétieux et par essence éphémère.

Le directeur des lieux, Philippe Blanc, élabore dans un bel outil technique sorti de terre en 2016 un vin d’une magnifique complexité qui réussit depuis des années à emprunter un joli chemin de crête entre puissance et finesse. L’homme n’a pas oublié d’inviter l’art dans cet antre composé d’inox et de chêne. Le tronc de l’imposant pacanier bicentenaire (et ancien locataire du parc foudroyé) trône en gardien du temple hors norme dans le chai à barriques du Château Beychevelle tout aussi extraordinaire.

Un présent entre terre et eau

L’artiste Duy Anh Nhan Duc, qui travailla la matière pour y faire figurer les sinuosités, les anfractuosités et le cheminement de la sève, a voulu imaginer le lien intrinsèque entre l’eau et l’arbre. « Une manière pour moi de rappeler le rôle fondamental que tient la forêt dans le cycle de l’eau. » La structure, verticale, mesure trois mètres de haut et donne une belle seconde vie à l’arbre originaire des États-Unis. 

Un quatrième grand cru classé de Saint-Julien qui semble vouloir se défaire avec délicatesse de son importante et constitutive emprise du passé. Pas de détricotage, mais l’envie de donner à voir un lieu où déambulent les fantômes du duc d’Épernon, de Marie-Amélie Kohn, de Molière, où fut érigé un chai moderne imaginé par Arnaud Boulain, où raisonnent les arboriculteurs et jardiniers d’aujourd’hui pour repenser un jardin parfaitement géométrique et le grand parc où se côtoient œuvres monumentales et œuvres éphémères.

Ces flâneries élégiaques temporelles et spatiales ancrent magnifiquement Beychevelle dans un présent entre terre et eau, donnent — et ça n’est pas la moindre de leurs qualités — à réfléchir à la nature environnante mais aussi à sa mutation et à sa résilience. Des enjeux dont on se dit qu’ils sont aussi au cœur des réflexions viticoles du Château Beychevelle, mais comment pouvait-il en être autrement ?

Informations pratiques

Château Beychevelle,
Route du Port,
33250 Saint-Julien-Beychevelle,
05 56 73 20 70,
Parc ouvert de 9h à 18h tous les jours jusqu’à fin octobre.

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