Sens du spectacle, engagement et humour : trois composantes essentielles de Mahaut Drama qui a le vent en poupe ces derniers mois avec son premier seul-en-scène, Drama Queen, qu’elle joue à Bordeaux le 18 juin.
Si dans le journalisme l’objectivité est un mythe, au moins les journalistes doivent-ils jouer la transparence avec leur lectorat. Une confession s’impose donc : l’auteur de ces lignes connaît la personne qui va lui répondre puisqu’ils ont partagé une partie de leur cursus universitaire. Le voile levé, il est temps de découvrir cette personnalité haute en couleur.
Des premières scènes à une tournée à guichets fermés dans toute la France, que de chemin parcouru ! Avez-vous eu le temps de vous rendre compte de chacune des étapes de votre parcours ?
Je n’ai pas énormément réfléchi à tout ça, mais ça a pris du temps. Je commence à être un peu exposée en ce moment alors que j’ai commencé il y a sept ans ! Il y a eu des creux, des moments très durs à gérer. J’ai commencé à comprendre que j’étais sur le bon chemin en 2022, au festival d’Avignon, où le producteur Philippe Delmas, qui détient l’Apollo à Paris, m’a repérée et proposé d’y jouer une fois par semaine. Une salle que j’ai réussi à remplir grâce à une grosse présence sur Instagram avec un reel par jour, de septembre à décembre 2022, qui ne marchait pas trop mal et surtout le bouche-à-oreille. C’est en janvier 2023 que je me suis dit qu’il se passait quelque chose.
Ensuite, il y a eu beaucoup de choses, mais sur lesquelles je travaillais déjà avant. Pour la radio, avant les passages à France Inter, j’ai eu la chance d’avoir des passages sur Nova pendant un an et demi. Pareil pour la télé, avant Quotidien sur TMC, j’ai été chroniqueuse de Piquantes, l’émission de Nicole Ferroni diffusée sur Téva. On m’a dit cette phrase : « Mieux vaut être connu deux secondes trop tard que deux secondes trop tôt » et j’avais souvent eu le sentiment que c’était tardif mais, au moins, maintenant, je me sens prête en termes de formation d’entraînement, de résistance à la pression, etc.
Dans votre spectacle, vous parlez de politique, de manière féroce et plutôt jouissive. Quel est votre rapport avec la chose ? Avez-vous des expériences dans le domaine ?
Le monde politique m’a toujours passionnée. Comme tout endroit de pouvoir, il s’en dégage une aura qui m’a attirée. Je viens d’une famille assez engagée politiquement. Ma mère est plutôt à droite, mon père anarchiste. À 18 ans, un âge où l’on est très révolutionnaire, je n’avais d’autres choix que de devenir centriste ! Et j’ai toqué à la porte du parti radical valoisien.
J’y ai milité pendant un an. J’étais la seule jeune, je collais des affiches « Faites l’Europe pas la guerre ». Ensuite, j’ai effectué un stage d’assistante parlementaire auprès d’un sénateur, Yves Pozzo di Borgo, qui a un peu changé de bord politique depuis… Une expérience très courte qui m’a suffi pour comprendre que la politique ce n’était pas l’agora, mais très cynique.
Je me suis dit que je pourrais être plus utile en m’engageant auprès d’une association. Bon, finalement, je ne l’ai pas fait, toutefois, je m’en sors avec ma part d’engagement et l’impression d’être une citoyenne active en ayant un propos politique engagé.
Une action essentielle selon moi dans le contexte politique qui est le nôtre, à trois ans d’une élection présidentielle qui ne présage que peu d’issues positives. L’engagement n’est pas dissociable du métier d’humoriste. Je ne me verrais pas le faire autrement en tout cas. C’est pour ça que je suis aussi très inquiète de la déliquescence de l’émission dont je fais partie, Le Grand Dimanche soir sur France Inter.
Pourquoi Drama ? Qu’est-ce qui fait que votre vie ressemble de temps en temps à une sitcom italienne des années 1980 riche en rebondissements ?
C’est un ami au lycée qui m’avait décrite en un mot pour résumer le fait que j’étais trop intense. Et, c’est vrai qu’ensuite dans mon parcours scolaire et professionnel, j’ai toujours eu ce côté trop intense, trop d’énergie… J’ai voulu faire de ce qui était vu comme un défaut, une qualité et cette sensibilité, ce côté tout feu tout flamme, j’ai voulu en faire mon étendard, donc j’ai gardé Drama.
Dossier le plus récent, la polémique dont vous avez fait l’objet après avoir participé à un débat où vous vous interrogiez sur la réponse des Français en cas d’arrivée de l’extrême droite au pouvoir en 2027. Comment avez-vous vécu toute cette période ?
Je ne pense pas l’avoir tout à fait assimilée. Je n’ai pas pu prendre de pause après pour me mettre au vert. Le fait de bosser m’a permis aussi de réfréner mes émotions, de me concentrer sur autre chose. Il y a eu évidemment une grosse crise de larmes le jour J ; c’était très étrange car je me retrouvais au centre d’un fait alternatif, n’ayant jamais dit ce dont on m’accuse. J’ai juste eu l’impression d’être un des nombreux exemples de la polarisation du débat public. Une situation très étrange.
Vous jouez à Bordeaux le 18 juin. Doit-on s’attendre à un appel de votre part comme celui de l’illustre général de Gaulle ?
Je ferai un appel à l’amour. Si les gens exerçaient plus leur empathie, je pense que beaucoup de choses iraient mieux.
Propos recueillis par Guillaume Fournier.
Informations pratiques
Drama Queen, Mahaut,
mardi 18 juin, 20h30,
Théâtre du Trianon, Bordeaux (33).