Du 13 au 16 mars, c’est la fête du cinéma en format réduit dans la capitale charentaise avec le festival international du film court d’Angoulême. 4 jours, 15 à 17 séances hebdomadaires, 60 films en compétition. Adrien Havas, directeur et programmateur, passe à table.

Comment se porte le court métrage ?

C’est une forme toujours aussi vivace comme l’atteste la très bonne santé de notre grand frère de Clermont-Ferrand. De toute façon, le court métrage se développe depuis ses origines dans une économie très précaire, donc cela n’a que peu d’impact sur les aspirants réalisateurs qui connaissent parfaitement les contraintes.

Et dans les chiffres ?

Depuis trois ans, nous recevons en moyenne 1 600 projets. À titre de comparaison, c’est 9 000 pour Clermont-Ferrand.

Quelque peu éprouvant de visionner telle quantité, non ?

On se débrouille pour tout voir en 5 ou 6 mois.

Que nous dit le court métrage de l’état du monde ?

Les vagues de sujets « sociétaux » se succèdent. Cette année, par exemple, on constate une tendance à s’emparer sous un nouveau jour des violences conjugales. Les questions liées au genre font, elles, l’objet de films mieux produits, mieux aidés, mieux financés. On note également la montée en puissance de propositions portées par des personnes issues de quartiers dits prioritaires.

De nouvelles voix talentueuses avec des points de vue différents, elles aussi soutenues, et à l’opposé de visions jadis incarnées par des personnes nullement originaires de ces quartiers. Enfin, la thématique environnementale est en net recul. Beaucoup a été fait et dans un contexte du pire en pire, c’est n’est hélas plus très porteur, hormis le volet pédagogique à l’encontre du jeune public.

Et en termes géopolitiques ?

Hors Europe, c’est l’Asie du Sud-Est la plus représentée. Le court est rare en Amérique, du Nord ou du Sud. En Afrique, il survit via des coproductions. La France est réellement privilégiée, on est dans un rapport de 1 à 10. Le Centre national du cinéma et de l’image animée apporte un soutien massif au court métrage. Il y a la promesse de percevoir des aides alors qu’ailleurs, c’est trop bouché. En France, par exemple, on est très en avance sur le registre de l’animation.

Le numérique a-t-il dopé la production ?

Cela facilite le passage à la réalisation, toutefois, pour connaître une diffusion en festivals et à la télévision, il faut que la production suive. Le numérique ne résout pas tout. C’est juste un outil.

Qu’en est-il de l’économie du court métrage ?

Hors festivals, point de salut. L’économie s’effondre. En termes monétaires, les chaînes et désormais les plateformes sont le graal.

Dans une ville en pointe sur l’image, recevez-vous beaucoup de projets du cru ?

La présence d’écoles prestigieuses contribue à l’émergence de talents locaux ; cela motive grandement les étudiants.

Qui vient au FIFCA ?

Pour moitié, un public jeune, âgé de moins de 25 ans, dont beaucoup d’étudiants angoumoisins. Puis, à parts égales, un public curieux qui assiste aux « séances famille » et, enfin, des cinéphiles ou des gens de la profession. Beaucoup de festivals nous envient ce public relativement jeune.

Votre action ne se réduit pas uniquement au temps du festival…

…en effet, depuis deux ans, nous avons une programmation mensuelle au cinéma de la Cité de la bande dessinée, à sa demande, ce qui est encore plus plaisant qu’un simple compliment. Nous avons La nuit des shorts en décembre. Le FIFCA s’est modernisé et a trouvé son rythme en 2015 lorsque l’association a pris le relais des étudiants de l’IUT d’Angoulême, qui en étaient à l’initiative. En outre, on se déplace beaucoup chez nos homologues néo-aquitains pour peser à plusieurs vis-à-vis du CNC et de la Région.

Quel est le parfum de l’édition 2025 ?

Celui de 2024 ! Plus sérieusement, nous tenons à conforter les acquis. Augmenter la compétition de films internationaux, avoir un focus sur un pays — cette année, l’Allemagne, Angoulême étant jumelée avec Hildesheim en Basse-Saxe —, monter en gamme dans la qualité, multiplier les rencontres. Nous rencontrons un fort développement de 30 à 40 % de fréquentation supplémentaire par an.

Certes, nous nous sentons « protégés », soutenus, bien vus, néanmoins, nous restons prudents sur la question du budget. Le FIFCA, c’est la promesse de films aussi étonnants qu’engagés, loin des films « chiants ». Nous sommes reconnus pour notre sélection de films de genre (SF, horreur, fantastique, polar), mais aussi de documentaires, de films d’animation. Nous avons à cœur de donner toujours envie au public afin qu’il revienne.

Propos recueillis par Marc A. Bertin

Informations pratiques

Festival International du Film Court d’Angoulême,
du jeudi 13 au dimanche 16 mars,
Angoulême (16).