Le Parvis, à Pau, accueille une monographie consacrée à l’immense photographe français disparu en 2009 Willy Ronnis, avec « WILLY RONIS PAR WILLY RONIS ».
Ce fut une exposition, en 2018, au Pavillon Carré de Baudouin, à Ménilmontant, dans le XXe arrondissement de Paris, puis une somme de 600 pages, publiée chez Flammarion, en 2024, sous-titrée : « Le regard inédit du photographe sur son œuvre ».
Sacré exercice au regard du corpus de cet enfant de la butte Montmartre, né en 1910, disparu en 2009, rattaché au courant « humaniste » de la photographie. Loin des clichés léchés et mis en scène de Robert Doisneau, le travail de Willy Ronis, par ailleurs féru de musique, de dessin et de peinture, est à la croisée de plusieurs pratiques — photoreportage (il entre en 1946 à l’Agence Rapho), portrait, photographie de rue —, mais aussi d’incessantes recherches formelles et de nombreuses commandes (Point de vue, L’Écran français, Le Monde illustré, Time, Life, Vogue, Air France).

Successivement, en 1983, 1989, puis en 2006, Willy Ronis fait don de l’ensemble de son œuvre à l’État français. Pour accompagner ce geste, il rassemble dans des albums une sélection de ses meilleures photographies ; écrivant pour chacune un commentaire fait de souvenirs et d’anecdotes, s’attachant aux conditions de la prise de vue et aux informations relatives au tirage.
Cet œil, qui s’éteint à quelques mois de son centième anniversaire, aura traversé le XXe siècle français, capturant dans un méticuleux noir et blanc mutations, mouvements sociaux, conflits, guerres, mais aussi et souvent sa ville natale et son petit peuple. Proche du Parti communiste français (il publiera dans Regards ou dans L’Humanité), il a su immortaliser les gens de peu avec grâce et générosité, confessant au passage que « le photographe peut dénoncer des choses, mais il ne doit pas avoir la prétention de changer les choses ».

Cette attention ne l’empêchera nullement de capturer les figures artistiques de son temps (Picasso, Prévert, Cocteau, Montand) ni des scènes de vie dont un Nu provençal, saisi l’été 1949, à Gordes, dans le Lubéron. Le modèle de cette photographie légendaire n’est autre que sa femme Marie-Anne se rafraîchissant après sa sieste. « Dans mes photos impromptues, ce n’était jamais donné d’avance, jamais sûr à 100%. Là, il n’y avait pas de risque de ratage. Cette photo-là était facile à faire, elle m’était offerte. »

Tombé dans les limbes durant les années 1970, le voilà reconnu ainsi que sa place dans l’histoire de la photographie la décennie suivante : invité d’honneur aux Rencontres d’Arles en 1980, l’ouvrage Sur le fil du hasard, publié en 1981 chez Contrejour, la maison d’édition de Claude Nori. « La photographie, c’est l’émotion », répétait-il.
Marc A. Bertin
Informations pratiques
« Willy Ronis par Willy Ronis »
jusqu’au samedi 14 juin,
Le Parvis Espace Culturel E. Leclerc Tempo, Pau (64).