Avec Rites de passage, Sylvie Balestra invente un rituel chorégraphique adolescent. Avec une danseuse hip-hop, un ballon de foot, une armure de guerrière. Et nous, tout autour.
Avant tout, faire cercle et communauté. Sylvie Balestra, chorégraphe et anthropologue, aime rassembler autour de pièces-rituels qu’elle infuse de récoltes de paroles et de gestes d’autrui. Grrrrr laissait une minuscule surface ronde à sa créature chatoyante, mi-femme mi-animale, qu’entouraient au plus près des enfants tout petits.
Nouvelle création à destination de l’adolescence
Rites de passage, nouvelle création à destination de l’adolescence, née de la rencontre avec un groupe de jeunes hommes en centre éducatif fermé, étale une surface bleue octogonale bien plus étendue, entourée de gradins de bois sur lesquels nous nous tenons assis.
Et c’est comme ça que ça commence : Janice Bieleu, jeune danseuse hip-hop de 24 ans, plante ses yeux dans les nôtres, à la recherche de regards et sourires. Elle nous tourne autour comme si elle prenait la mesure de l’espace où tout allait se jouer, comme si elle faisait connaissance avec cette communauté avant de se jeter dans l’arène de sa propre métamorphose.
C’est par le ballon de foot que la danse se manifeste, enchaînant postures et déplacements surgis de l’enfance ou d’une cour de collège. Lorsque l’objet finit par disparaître, sa danse garde un temps l’empreinte du dribble, avant de gagner en ampleur, jusqu’à une envolée de steps percussifs à l’énergie transe.
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Guerrière ou footballeuse américaine ?
En survêtement et t-shirt XL, Janice danse à l’équilibre : entre des mondes et des âges, entre des gestes qui lui appartiennent et d’autres dont la chorégraphe la fait récipiendaire. Au seuil d’une vie d’adulte, la métamorphose a lieu sous une parure — récurrente dans le travail de Sylvie Balestra — mi-samouraï, mi-futuriste, bardée de bijoux-amulettes.
Armure ou bouclier ? Guerrière ou footballeuse américaine ? Le temps qu’on se questionne, et qu’une volée de secousses corporelles l’agite, les atours mystérieux sont retombés à terre. La danseuse éponge les gouttes de sueur, revient parmi nous, sans défense, sans peur, comme lavée de ses tourments.
L’ultra-précision de la scénographie — couleurs, géométries, formes, matières, jusqu’à la composition sonore obsédante de Simone Aubert d’Hyperculte — circonscrit ce solo de l’adolescence — âge des effervescences, même intérieures — dans un cadre très — trop ? — léché. Sylvie Balestra préfère un rituel où rien ne déborde vraiment, où tout se transforme en douceur, sous contrôle et à une légère distance, dans la littéralité du geste observé chez d’autres.
Stéphanie Pichon
Informations pratiques
Rites de passage, Cie Sylex, conception et chorégraphie Sylvie Balestra,
mercredi 8 janvier 2025, 19h30,
grande salle, théâtre d’Angoulême, Angoulême (16).
jeudi 30 janvier 2025, 20h,
Théâtre du Cloître, Bellac (87).
du jeudi 6 au vendredi 7 février 2025, 19h30,
Le Champ de Foire, Saint-André-de-Cubzac (33).
mardi 11 février 2025, 19h,
Salle de l’Arsenal, Château d’Oléron, Oléron (17).