Du 2 au 27 avril, à Bordeaux, la 34e édition des itinéraires des photographes voyageurs présente le travail de 13 photographes dans 8 lieux d’exposition. Vincent Bengold, infatigable directeur artistique, fait les présentations.

Du 2 au 27 avril, 13 propositions, 8 lieux — on notera un volume à la hausse par rapport à 2024. Est-ce toujours la bonne formule ?

Effectivement, c’est 30% de mieux que l’an dernier. Une moyenne entre 12 et 13 expositions, voilà l’objectif pour l’avenir. De toute façon, inutile d’en faire trop, surtout en plein Mois de la photo. Les IPV ne souhaitent pas perdre leur identité dans cette espèce de méli-mélo pour le public. On essaie de coller au plus près de ce que l’on défend depuis toutes ces années : des auteurs et du voyage. On révèle une photographie contemporaine plurielle : des expériences, de l’intime, du noir et blanc, de la 3D… 2025 est une édition plus variée que jamais.

Pour la deuxième année, au Centre Jean Moulin, se tient une lecture de portfolios. De quoi s’agit-il ?

Une journée professionnelle à l’initiative de l’association Cdanslaboite. Un rendez-vous comme dans de nombreux festivals sur inscription, puis, durant 20 minutes, on présente son travail. Face à vous, un panel de pros questionne le contenu, les perspectives.

Ce sont des « lectures » pour non seulement trouver des issues à son travail, mais aussi pour rencontrer éditeurs, directeurs de festivals, et d’autres photographes. On espère des regards bienveillants lors de ces échanges qui peuvent néanmoins déstabiliser alors que l’on pense que son geste est achevé. Jadis, on appelait ça un « séminaire critique ». Cela pousse à voir ce que soi-même on ne sait voir. Un exercice très formateur permettant de trouver le nécessaire recul.

Nouveauté 2025, le Diapoké, diaporama et karaoké. Une incitation à s’enjailler ?

Le fruit défendu d’un collectif, les Diapokeurs (David Philippon, Estelle Rebourt-Ogura, Sébastien Fanger, Jean-François Dalle-Rive), qui interprètent en public, sur des diaporamas de leurs photos, des chansons, de Barbara à Pink Floyd. Un vrai show itinérant. Aujourd’hui, tout le monde prend des images et chante sous la douche. Eux le feront, sans douche, le 10 avril, de 19h à 21h30, à l’espace Saint-Rémi. En résumé, une forme actualisée de la traditionnelle soirée diapo.

Que nous racontent du Monde les IPV 2025 ?

On a clairement tourné la sinistre période de la pandémie, qui fut un tsunami sans égal. Cette 34e édition présente des visions communes sur l’intime, par exemple « Us » d’Arno Brignon, récit de voyage et journal de bord aux États-Unis, familial, introspectif, imprégné des réminiscences enfantines de l’absence du père.

De même, « Les Paradis perdus » d’Antoine Vincens de Tapol, exploration de la notion d’album de famille. Sans omettre mon coup de cœur, « Refuges » d’Émeline Sauser, lauréate du prix Mentor 2024, qui revisite la relation à l’autre, le portrait avec beaucoup de pudeur et de dignité. Dans un registre plus classique, « Ashes of the Arabian’s Pearl » de Valentin Valette renoue, non sans poésie, avec la veine documentaire. Je citerai aussi « Villa San Remigio » de William Guidarini, espèce de relation amoureuse au territoire. Je constate quelque chose de très intime où tout le monde vise à l’universel avec une profonde possibilité d’identification à travers ces itinéraires.

Les IPV sont un révélateur de la sensibilité plus que du parcours des auteurs. Le photographe est au centre de nos préoccupations.

Et quoi d’autre ?

Nous sommes ravis que le Musée Mer Marine partage pour la première fois le programme des IPV en accueillant « Orang Laut — Homme des mers » de Guillaume Holzer, fruit d’une immersion de 8 ans auprès d’une ethnie indo-malaise, les Bajau, ultimes nomades marins. Un somptueux travail en noir et blanc, des séries sur toiles, de vraies images et de vrais tirages car, oui, on apprécie les vrais tirages sur de vrais supports.

Nous aimons ce rapport charnel au format, de regard à regard. Sinon, les IPV ont intégré le Réseau LUX, réseau professionnel national de festivals et foires. Nous sommes désormais 31 en France — Arles, Planches Contact, ’Émoi photographique, L’été photographique de Lectoure, Nicéphore+, entre autres — capables de coopérer, de créer des synergies afin que puissent naître des travaux. Nous sommes en mesure de défendre la notion de festival dédié au genre et à sa diffusion face aux institutions, les droits d’auteur, les engagements environnementaux. On gagne ainsi en lisibilité, on se sent moins seul. Une sacrée bouffée d’oxygène pour les IPV…

Propos recueillis par Marc A. Bertin

Informations pratiques

Itinéraires des Photographes Voyageurs,
du mercredi 2 au dimanche 27 avril,
Bordeaux (33).