Connect, nouveau festival bordelais ambitionne de faire venir des passionnés du monde entier pour célébrer la culture skate du 17 au 20 octobre. Rencontre avec Léo Valls, directeur de la programmation, organisateur et rider.

Longtemps chassé, le skate est de plus en plus « réhabilité » à Bordeaux, comment expliquer cette bascule ?

Les premiers arrêtés interdisant le skate à Bordeaux datent de la fin des années 1990. Les décideurs, dans les années 2000-2010, pensaient uniquement le skate autour du prisme sportif et donc pensaient qu’en faisant des skate-parks, la pratique était cadrée. La réalité, c’est que le skate se passe partout dans la ville car c’est son essence.

En 2017, nous nous sommes organisés en tant que communauté pour proposer des compromis et développer un système de médiation afin de développer le skate dans la ville. De fil en aiguille, des projets culturels se sont montés avec des expositions ou des sculptures skatables et, plus globalement, une démarche qu’on appelle le skate-urbanisme visant à réfléchir à l’intégration du skate et des jeux urbains dans la ville.

Le festival Connect prouve-t-il que l’état d’esprit serait en train de changer ?

Bien sûr. L’idée de ce festival est de cristalliser, de rassembler autour du skate et de ses ramifications — artistiques, culturelles, sociales — qui en font une pratique générant des bienfaits pour la ville et pour ses pratiquants avec des valeurs de partage, d’échange, de créativité.

Ce que nous avons mis en place à Bordeaux s’est concrétisé l’année dernière par un guide du skate municipal, la légalisation du skate dans la ville et la validation officielle d’une démarche de skate-urbanisme. De fait, il nous a semblé logique, avec l’aide de l’entreprise Côte Ouest qui nous a aidés sur un projet de sculpture skateables, de poursuivre cette approche en montant un événement international pour rassembler les publics et célébrer la culture skate.

Bordeaux est-elle une ville pionnière dans cette approche du skate-urbanisme ?

C’est une démarche qui existe en Scandinavie dans des villes comme Copenhague ou Malmö, réputées pour leur qualité de vie. Ils ont pensé le skate-urbanisme et ses impacts positifs sur la mobilité douce, le tourisme, le design des espaces publics ou la réactivation de lieux en déshérence. Bordeaux, de son côté, a développé quelque chose de significatif avec des projets phares.

Autour de tout ça, il y a plein de questions qui se bousculent comme la question de l’identité, de la parité avec la féminisation de l’espace public, la question de la santé mentale ou physique et aussi la problématique de la ville de demain avec l’intégration de nouveaux usages.

À Bordeaux, quel lieu a été réactivé grâce au skate ?

Symboliquement, on peut citer la terrasse du Général-Koenig, à Mériadeck, qui est un peu le lieu de naissance du skate à Bordeaux. Un endroit longtemps barricadé pour y interdire toute pratique. C’était un lieu un peu en déshérence qui a été recalibré pour la glisse, sans en faire un skate-park.

C’est devenu un lieu partagé. Le fait qu’il y ait du skate ramène de la vie, crée un phénomène de sécurité naturelle également, incitant d’autres publics à investir la place.

La programmation regroupe ateliers, conférences, projections… L’idée est-elle de démocratiser la culture skate ?

Notre ambition est de représenter le skate à travers le prisme culturel, urbain, artistique et social avec la volonté de rassembler les publics et de se servir du skate comme tremplin pour évoquer des sujets de société et échanger des idées. Le festival a deux axes.

D’un côté, l’installation pendant trois mois de nouvelles sculptures skatables dans plusieurs endroits de la ville (Miroir d’eau, cours du Chapeau-Rouge, etc.). Des œuvres toutes sous le signe de la connexion, comme des poignées de mains par exemple. De l’autre côté, du 17 au 20 octobre, à la cour Mably, il y aura un gros temps fort avec plusieurs expositions, des projections, des conférences avec des chercheurs, des points de rencontres avec des ONG, des concerts, des visites guidées de la ville à travers le regard du skateur, des sessions avec des skateurs internationaux…

Beaucoup de choses ! Pour la suite, nous voulons faire grandir Connect à Bordeaux mais aussi faire voyager le festival pour établir des ponts concrets avec d’autres communautés et d’autres villes dans le monde.

Propos recueillis par Guillaume Fournier 

Informations pratiques

Connect,
du jeudi 17 au dimanche 20 octobre,
Bordeaux (33).