À la faveur de deux prêts exceptionnels grâce à la « saison impressionniste (1874-2024) du musée d’Orsay, le musée des Beaux-Arts de Bordeaux présente un accrochage consacré au mouvement pictural majeur.

Les célébrations du 150e anniversaire du mouvement impressionniste ne se limiteront pas au musée d’Orsay. 30 établissements français, réputés pour leurs fonds du XIXe siècle, y sont associés. Ainsi, en Nouvelle-Aquitaine, le musée des Beaux-Arts de Bordeaux et le musée des Beaux-Arts de Limoges — ville natale d’Auguste Renoir — ont été retenus.

En hommage à l’exposition fondatrice du 15 avril 1874, dans l’atelier parisien du photographe Nadar, boulevard des Capucines, Sophie Barthélémy, directrice du MusBA, souhaitait des œuvres « en écho aux collections » mais également « privilégier les artistes femmes et les paysages de bord de mer ».

Ce qui ne l’a nullement empêchée de demander la lune… Le Balcon d’Édouard Manet (1868-1869), où figure Berthe Morisot, la seule femme de l’école impressionniste, présente au MusBA avec un portrait de son neveu (1876).

Toile de maître prisée par toutes les institutions

Toile de maître, prisée de toutes les institutions internationales, ce portrait de groupe, inspiré par Las Majas en el balcón (1808-1814) de Goya, est une allégorie évanescente entre noirs profonds et tons vifs, flou et netteté, stupéfiant jeu sur le cadrage et la profondeur.

Un geste radical de la part de celui qui déclarait « Je me suis toujours défendu d’être un révolutionnaire » et fut pourtant érigé en chef de file des avant-gardes. Et quel tour de force dans lequel le regard inlassablement se perd, Gustave Caillebotte, qui l’acheta en 1884, ne nous contredira.

L’influence conjuguée de William Turner et d’Eugène Boudin

La Cabane des douaniers, effet d’après-midi (1882) de Claude Monet offre, elle, une vue saisissante sur la gorge du Petit-Ailly, qui entaille la falaise normande de Varengeville, et deviendra une inépuisable source de motifs, reprise pas moins de 13 fois.

« Impression, j’en étais sûr. Je me disais aussi, puisque je suis impressionné, il doit y avoir de l’impression là-dedans… Et quelle liberté, quelle aisance dans la facture ! »

Louis Leroy, Le Charivari, 25 avril 1874

Dans ce paysage d’une douceur éphémère, on devine l’influence conjuguée de William Turner, « le peintre de la lumière », et d’Eugène Boudin, indiscutable précurseur du mouvement impressionniste. Cette splendeur, aux modestes dimensions, déposée au musée national des Douanes, temporairement sur les cimaises de l’aile Bonheur, symbolise l’un des aspects fondamentaux de l’école impressionniste, qui, suivant les pas du Réalisme, quitta l’atelier et pris la clef des champs, aidée par une vraie révolution technique : la peinture en tube.

Le parcours, en 27 œuvres, fait dialoguer ces deux prêts avec un corpus d’artistes contemporains du mouvement, fussent-ils pré ou post-impressionnistes, de la merveilleuse école de Barbizon (comment ne pas être subjugué par Le Bain de Diane (1855) de Corot ?) au pointillisme naissant de Seurat en passant par la sublime Rolla (1878) d’Henri Gervex, d’après un poème d’Alfred de Musset (1833), qui causa un tollé au salon de 1878 pour immoralité et indécence. Une modernité intemporelle.

Marc A. Bertin

Informations pratiques

« Saison impressionniste (1874-2024) »,
jusqu’au lundi 10 juin,
aile Bonheur, MusBA, Bordeaux (33).

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