Table superlative, installée en périphérie des Chartrons bordelais, Cent33, la remarquable maison d’Émilie et Fabien Beaufour ne cesse de se réinventer et de surprendre.
À en croire le chef, « fini la bistronomie, bonjour la gastronomie » ! Confession : les papilles n’ont ici que des souvenirs émus. Nuance de taille, Fabien Beaufour parle de gastronomie « décomplexée » prônant la rencontre entre le beau et le bon moment. C’est noble. Quant à la réussite de l’adresse, Cent33, ouverte en janvier 2019, que dire ? Clientèle fidèle et fidélisée. L’affluence ne dément pas et la vente à emporter a cartonné durant les interminables confinements.
D’ailleurs, cette période aussi étrange qu’éprouvante a été le déclic d’une mutation passant notamment par de multiples engagements vers l’éco-responsabilité. Pardon ? Oui, un restaurant, ça consomme, ça jette, ça gâche, ça pollue. Dès lors, que faire ? Trouver des solutions adaptées au fonctionnement (produits d’entretien, non alimentaire, gestion et valorisation des déchets) tout en songeant au bien-être au travail des équipes.
Cent33, restaurant labelisé Écotable
En outre, ici, un point d’honneur aux circuits courts, au bio, aux saisons, d’où la création d’un potager de 200 m2 en permaculture, à un jet de pierre de l’établissement, dévolu aux herbes aromatiques, aux fruits rouges et à quelques légumes et condiments fort dispendieux. Ce n’est pas encore l’autosuffisance, mais l’assurance d’une haute qualité, poussant grâce au compost maison.
Accompagné par la Chambre de Commerce et d’Industrie de Bordeaux et l’ADEME Agence de la transition écologique, le Cent33 a ainsi obtenu le label Écotable, premier label de restauration durable français ! Déjà 2 macarons. Un troisième en vue ? Rappelons, au passage, les 3 toques au Gault & Millau et un Bib Gourmand au Guide Michelin. Bref.
Montée en gamme de la cave au service d’une cuisine créative
Bon et l’assiette ? Patience, d’abord, noter la montée en gamme de la cave, passant de 50 à 200 références, soit tout le Bordelais, l’ensemble du vignoble français et quelques flacons européens (Autriche, Espagne, Italie, Portugal, Suisse). Autant dire que les accords mets et vins ne sont pas une posture. En 6 (menu Découverte) ou 8 (menu Signature) temps, cette cuisine créative, qui magnifie l’acidité et l’amertume, est sublimée.
Inutile d’aiguiser les couteaux, de la mise en bouche (une guimauve betterave et parmesan succulente) à la mignardise (une espèce de calisson huile d’olive et vanille Bourbon à se damner), un seul mot : renversant.
Un repas pour les fins gourmets
Entrées. Noix de Saint-Jacques marinées, topinambours (en crème et en chips), noisettes, salicornes, yuzu, un sommet de rafraîchissement savoureux. Salade tiède de poulpe, crème de butternut, graines de courge, salicornes, roquette. LE MUST du Cent133. On pourrait manger son poids de cette merveille. Tous les jours. À chaque repas.
Plat. Suprême de pintade, farci sous la peau au foie gras brioché, salsifis (grillé et chips) et soubise. Un fondant d’une indécence interdite aux mineurs.
Dessert. Carpaccio d’ananas, cheesecake à la noix de pécan. Était-ce cette note de coriandre, mais on aurait pu lécher goulûment l’assiette…
Vin. Coup de cœur pour le Mas d’Espanet, cuvée Éolienne, blanc du Languedoc réussissant le tour de force du gras et de la fraîcheur.
Verdict. À quand l’étoile ? Guide rouge, mais que fais-tu ?
Marc A. Bertin