LES ARCHIVES – Bar, restaurant, hôtel, sis dans un haut lieu patrimonial revisité mais nullement dénaturé, l’établissement s’est imposé comme l’une tables majeures de Poitiers.
Avant l’assiette, un peu d’histoire. Soit une chapelle des Jésuites, édifiée entre 1852 et 1854, selon les plans de l’architecte Magloire Tournesac. L’édifice néogothique, long de 55 mètres, s’enorgueillissant d’une triple nef et d’une flèche dominant l’ouest de la ville de Poitiers, est fermé au culte en 1870. 1950, le Département de la Vienne l’acquiert pour y installer ses archives. Faute de place, en 1996, la mémoire du 86 déménage. Il faut alors attendre 2010 pour que la chapelle du Gesù change à nouveau de destin. Et, en 2012, après un chantier hors norme, conduit par l’architecte François Pin, les Archives s’ouvrent à un nouveau public.
2022, l’adresse fête ses dix ans de bons et loyaux services au nom d’une cuisine raffinée, dénuée de prétention, mais d’une irréprochable tenue, sous la houlette du chef Paul Ducouret. Bien évidemment, avant de passer à table, c’est le décorum qui provoque une fracture de la rétine. Chapiteaux, clefs de voûte des piles décorées, coursive, luminosité, habile jeu de suspensions et une hauteur vertigineuse. Non, vous n’êtes pas dans un rade, ni dans un PMU. Pour autant, nulle ostentation à l’horizon, la salle est contenue entre la vaste cuisine ouverte et le bar (bien pourvu en spiritueux). Tables de 2 à 8 convives, sièges confortables (oui, ça existe !) en velours et tapis ad hoc. Chic et non clinquant.
Arrivant à pinces de la gare (à un jet de pierre par la passerelle), l’objectif était simple : déjeuner. Et la formule du midi, entrée/plat/dessert, à 19,90 €, du lundi au vendredi, vaut bien une messe. 3 choix possibles dans chaque registre. Beaucoup de combinaisons. Alors, on a joué le tiercé (placé) : gaspacho de pastèque, fraise au basilic, croûtons de foccacia ; poisson du jour au beurre vanillé, croustillant de riz au lait de coco et blettes grillées ; millefeuille croquant à la fraise.
Une entrée surprenante de fraîcheur et de sensation fruitée : adios le souvenir vivifiant de l’ail qui revigore, la fraise la ramène et désaltère avec une folle sensualité. Ce jour-là, le merlu, cuit à la perfection, disputait le titre à un croustillant de riz, légèrement parfumé et dressé tel une barre de céréales, et une maximale feuille de blette extrêmement fondante. Verdict : un plat tout en nuances, équilibré et subtil. Quant à la douceur de fin de repas, que dire ? Une « relecture » du millefeuille, sur croquant très croquant, riche d’un appareil aussi fin que voluptueux se mariant à merveille avec le coulis de fraises et quelques quartiers de ce petit fruit rouge de saison (et fil conducteur de ce déjeuner). Conclusion : un épatant rapport qualité/prix que l’on mange seul, à deux, en famille ou discutant affaires, dans un registre gastronomique irréprochable. Et pour qui redouterait le brouhaha dans cet imposant volume, nulle crainte : on sait se parler sans tendre l’oreille au-dessus de sa soupe ni avoir recours à un porte-voix. C’est tout le miracle du lieu : offrir une réelle intimité.
3 sérieux menus (découverte, 35 € ; des Archives, 49 € ; dégustation, 59 €) avec option accord mets et vins, beaux plats signatures (terrine de foie gras, beuchelle à la tourangelle) et une carte des vins offrant une plus large place aux vignobles girondins que la majorité des bouclards bordelais…
En sortant, en direction du TAP, petit détour chez Antiq – café, restaurant, épicerie fine, installé dans les anciens locaux de l’École européenne supérieure de l’image —, émanation des Archives, qui organise régulièrement des ateliers et propose une offre « sur le pouce » (quiche ou sandwich + boisson + dessert) à 12 €.
Marc A. Bertin
Restaurant Les Archives
14, rue Édouard-Grimaux, 86000 Poitiers
Tous les jours, 12h-14h et 19h-22h
Réservations : 05 49 30 53 00 – www.lesarchives.fr
Antiq
15, rue Édouard-Grimaux 86000 Poitiers
Du mardi au samedi, 10h-20h
Réservations : 05 49 30 53 05